Mon cinéma / Juin 2023

Publié le 8 Juillet 2023

Dernière nuit à Milan de Andrea Di Stefano

Franco Amore porte bien son nom. Il dit de lui-même que, durant toute sa vie, il a toujours essayé d’être un honnête homme, un policier qui, en 35 ans d’une honorable carrière, n’a jamais tiré sur personne. Ce sont en effet les mots qu’il écrit pour le discours qu’il tiendra au lendemain de sa dernière nuit de service. Mais cette dernière nuit sera plus longue et plus éprouvante qu’il ne l’imagine.

Un générique de début qui m’a subjuguée. Survol de Milan depuis le centre historique jusqu’au bout de la ville, une séquence démente et hypnotisante. ⠀

Franco Amore est un flic honnête et normal qui n’a jamais réussi à avoir la promotion qu’il pense mériter. Il a un petit job de surveillance pour arrondir son petit salaire, il est marié à Viviana, une femme énergique et attachante qui le soutient dans toutes les circonstances. ⠀

Son petit job en entraine un autre mais rien ne va se passer comme prévu... alors que la retraite et la pension attendues sont à quelques heures à peine. Un vrai bon polar d’ambiance, j’ai été embarquée du début à la fin. Les personnages de Franco, Viviana et Cosimo, le cousin sont bien écrits. Franco semble dépassé par quelque chose de trop gros pour lui, on sent tous ses doutes, ses tiraillements. Viviana est plus forte et plus intelligente qu’il n’y parait, un très beau personnage féminin. Tout le casting est parfait porté par le regard triste de Pierfrancesco Favino et l’éclat de Linda Caridi. Le film attire aussi l’attention sur la vie de policier mal payé dans un pays ou la mafia, peu importe son origine, n’est pas loin. J’ai beaucoup aimé.

Love life de Kôji Fukada

Avec son époux Jiro et son fils Keita, Taeko vit juste en face du domicile de ses beaux-parents, qui n’ont jamais vraiment accepté que leur fils se marie avec elle. Ils lui auraient préféré son ancienne fiancée, qui ne s’est jamais remise la rupture d’avec Jiro. Quand Taeko le découvre, un événement vient bouleverser leurs existences et Park, le père biologique de Keita, réapparait.

Position délicate de Taeko, l’intruse aux yeux de la famille. Pourtant il est évident que Jiro l’aime et considère Keita comme son fils. Une mise en place des personnages qui montre toute la complexité des rapports sociaux et familiaux au Japon. Une première partie lumineuse et joyeuse malgré les tensions. Des ex qui reviennent dans la vie des autres, des liens qui se renouent, des espoirs que l’on met quand on essaie de se raccrocher à du tangible... Intéressant Park, un immigré coréen sourd muet, interprété par comédien sourd muet et cela se sent dans la sincérité du personnage. Avec Taeko, ils sont dans une bulle de langage, excluante pour les autres... Belle métaphore de l’exclusion subie par eux à d’autres moments. Un portait de la société japonaise à travers plusieurs personnages, des sentiments contradictoires, des hésitations incessantes, les traditions... avec aussi une mise en avant de la précarité au Japon à travers le travail de Taeko.

Kôji Fukada, dont j’avais beaucoup aimé le dyptique "Suis moi je te fuis / Fuis moi je te suis", réalise un film d’une grande richesse sur le Japon contemporain encore marqué par le patriarcat et des codes qui ont du mal à disparaître. Pendant la projection, je ne savais pas toujours quelle histoire on voulait me raconter et j’ai parfois trouvé le temps long. Mais c’est un film auquel on repense après et qui devient plus fort que sur le moment en laissant une trace...

Asteroid City de Wes Anderson

Asteroid City est une ville minuscule, en plein désert, dans le sud-ouest des États-Unis. Nous sommes en 1955. Le site est surtout célèbre pour son gigantesque cratère de météorite et son observatoire astronomique à proximité. Ce week-end, les militaires et les astronomes accueillent cinq enfants surdoués, distingués pour leurs créations scientifiques, afin qu’ils présentent leurs inventions. À quelques kilomètres de là, par-delà les collines, on aperçoit des champignons atomiques provoqués par des essais nucléaires.

On part de la genèse d’une pièce de théâtre qui raconte une histoire avec unité de temps et de lieu, Asteroid City. Wes Anderson nous plonge dans un film censé être du théâtre mais pour moi ce qui se passe dans le "film" se suffit à lui-même. La mise en scène en noir et blanc de tout le côté scène et préparatifs est ce que j’ai le moins aimé, pas désagréable mais moins fort que le reste.

J’ai aimé tout ce qui se passe dans l’univers coloré et décalé d’Asteroid City. Les rencontres improbables rendues possibles par la situation, le mélange des gens et des genres, l’absurde, la science vs l’irrationnel et l’alien. ⠀

On découvre des personnages à une croisée des chemins et de leur vie, des petits groupes différents qui interagissent à la faveur d’éléments venus d’ailleurs. Un humour subtil et touchant, on reconnaît bien la pâte Anderson. Toujours un effet sympathique avec un casting dément dans lequel même une apparition de quelques minutes d’une star qu’on aime donne le sourire. On croit voir Marylin Monroe dans de célèbres photos, des clins d’œil à l’histoire du cinéma avec des figures emblématiques, le cow-boy, le militaire, l’alien, la starlette, le génie de la science... ⠀

Avec un côté nostalgique comme une sorte de parenthèse étrange et douce avant que tout le monde reprenne le cours de sa vie...

Marcel le coquillage (avec ses chaussures) de Dean Fleisher-Camp

Marcel est un adorable coquillage qui vit seul avec sa grand-mère Connie, depuis sa séparation avec le reste de leur communauté. Lorsqu'un réalisateur de documentaires les découvre dans son Airbnb, la vidéo qu'il met en ligne devient virale et offre à Marcel un nouvel espoir de retrouver sa famille.

Un film qu'on peut assimiler à du développement personnel et à une leçon de vie ! ⠀ L'importance de l'appartenance à une famille, à une communauté pour être heureux. Des trouvailles géniales tout au long du film, un mélange réussi entre animation et vraies images. Un film très ancré dans le contemporain, la société des réseaux.

Marcel a un vrai regard acéré sur la vie et sur les comportements humains. Les relations avec sa mamie qui perd un peu la tête et qui s'approche de la fin de vie sont très touchantes et réalistes. Une parabole mignonne et profonde sur le sens de la vie et ça fait réfléchir sur sa propre vie. J'ai beaucoup aimé même si parfois le côté documentaire en style de rythme me faisait décrocher. Craquage total sur Marcel, sa petite voix, son sens et sa perception des gens et de la vie. On devrait tous avoir un Marcel dans sa vie !

 

Elémentaire de Peter Sohn

Dans la ville d’Element City, le feu, l’eau, la terre et l’air vivent dans la plus parfaite harmonie. C’est ici que résident Flam, une jeune femme intrépide et vive d’esprit, au caractère bien trempé, et Flack, un garçon sentimental et amusant, plutôt suiveur dans l’âme. L’amitié qu’ils se portent remet en question les croyances de Flam sur le monde dans lequel ils vivent...

Beaucoup de thèmes et de beaux sujets dans ce dernier Pixar. L'immigration, le déracinement, l'intégration, la différence, la tolérance, la peur de l'étranger, la pression familiale réelle ou supposée, la façon dont les enfants peuvent se brimer pensant faire plaisir à leurs parents, aimer quelqu'un qui ne correspond pas aux codes... Tout ça exprimé en animation avec des personnages représentant les éléments naturels. Une très bonne idée de mélanger ce qui ne se mélange pas d'habitude et de réussir à créer des liens et des ponts.

Avec un magnifique message : si on y met du sien on peut réussir à tous vivre ensemble... Si seulement... Un film très riche avec toutes les palettes d'émotions de l'humour aux larmes. J'ai beaucoup aimé, j'ai passé un très bon moment !

The Flash de Andy Muschietti

Les réalités s’affrontent lorsque Barry se sert de ses super-pouvoirs pour remonter le temps et modifier son passé. Mais ses efforts pour sauver sa famille ne sont pas sans conséquences sur l’avenir, et Barry se retrouve pris au piège d’une réalité où le général Zod est de retour.

Une première scène que j’ai adorée, du peps, de la folie, de l’humour et des bébés dans des situations inédites ! Un double rôle attachant bien joué par Ezra Miller, des jumeaux temporels avec un lien de fraternité très fort entre eux, on ne sait plus s’ils sont une même personne ou des frères. Par contre Ezra Miller, même cheveux longs et look ado, j’ai eu du mal à lui donner 18 ans...

Un vrai plaisir de retrouver Michael Keaton en Batman et j’ai vraiment aimé toute la partie The Flash/Batman dans l’antre de Bruce Wayne. De bonnes idées quand Barry retourne dans le passé et essaie de retrouver les héros du futur. J’ai kiffé la Supergirl et Sasha Calle dans le rôle. Elle déchire ! Beaucoup de caméos sympathiques et drôles. Un méchant pas trop réussi et sous exploité. La fin s’étire un peu trop en longueur, pas fan de la boucle temporelle infinie et des images associées. Dans l’ensemble un film que j’ai apprécié pour le divertissement et le casting mais qui aurait gagné à être resserré sur une intrigue plus simple.

 

Le challenge de Gene Stupnitsky

Maddie est sur le point de perdre sa maison d’enfance et elle pense avoir trouvé la solution à ses problèmes financiers lorsqu’elle tombe sur une offre d’emploi intrigante : parents fortunés cherchent quelqu’un pour emmener Percy, leur fils introverti de 19 ans, dans une série de dates afin de le décoincer avant qu’il ne parte pour l’université. A la grande surprise de Maddie, Percy rend ce challenge plus compliqué que prévu et le temps est compté. Elle a un été pour relever ce challenge ou se retrouver sans toit.

Un festival Jennifer Lawrence qu’on découvre très douée dans le registre humour. Je suis fan de l’actrice pour laquelle je me suis déplacée au cinéma et je n’ai pas regretté de la voir aussi adorable et fun. Elle est vraiment très à l’aise dans ce rôle d’adulescente délurée et pleine de contradictions.

Un bon moment dans l’ensemble même si ce n’est pas un grand film. J’ai eu le divertissement que j’étais venue chercher. De l’humour, de l’émotion et quelques réflexions bien senties sur la gentrification de lieux authentiques qui perdent leur charme et leur tranquillité avec le tourisme de gens riches ayant l’habitude de se comporter ailleurs comme partout et de dénaturer les endroits dans lesquels les locaux n’ont plus les moyens d’habiter. J'ai bien aimé la relation somme toute crédible qui se développe entre les deux personnages.

Passages de Ira Sachs

L'histoire de deux hommes qui sont ensemble depuis quinze ans et ce qui se passe quand l'un d'eux a une liaison avec une femme.

Complexité des rapports amoureux, relations toxiques explorées à travers un trio de deux hommes et une femme. Une rencontre qui ne se fie pas au genre et une nouvelle histoire d’amour qui s’écrit tandis que l’autre est en train de s’étioler. Mais le personnage pivot, réalisateur égocentrique et manipulateur, ne semble jamais savoir ce qu’il veut. Tout le monde, personne, un coup l’un, un coup l’une. Un personnage assez détestable malgré son magnétisme, qu’on a du mal à apprécier. Je n’ai pas grand-chose à dire sur le film que j’allais voir avec envie pour son trio d’interprètes que j’aime totalement. Une affiche avec ces trois-là j’étais à fond. Pourtant j’ai trouvé le scénario tellement faible que je n’ai pas réussi à aimer plus que ça. L’intérêt du film, hormis, le casting m’a semblé très limité. Dommage...

Wahou de Bruno Podalydès

Catherine et Oracio sont conseillers immobiliers et enchaînent les visites de deux biens : une grande maison bourgeoise « piscinable, vue RER », et un petit appartement moderne situé en plein triangle d'or de Bougival. Malgré des visites agitées, ils ne perdent pas de vue leur objectif : provoquer le coup de cœur chez les potentiels acheteurs, le vrai, l’unique qui leur fera oublier tous les défauts. Celui qui leur fera dire « Wahou ! »

Un défilé de clients qui ont chacun une raison différente d’être là, une histoire drôle ou triste dans leur vie, des projets fous ou pas. Tout ce qu’on met dans un achat immobilier comme si notre bonheur en dépendait (parfois c’est vrai).

On se place du côté de l’agence avec Catherine et Oracio qui font le même métier mais pas de la même façon. On sent leur lassitude parfois, le côté déprimant et l’interrogation sur le sens du métier, ils sont un peu psy et il faut assumer les confidences des clients. Et du côté de la vente avec un vieux couple qui veut vendre à quelqu’un qui saura « sentir » leur maison pleine de défauts.

Une touche d’humour en plus est apportée avec le regard du jeune stagiaire Jim. Le film propose un bel aperçu de tout ce qui joue dans une visite que ce soit du côté de l’achat, de la vente ou de l’intermédiaire. Il démonte les clichés ou au contraire les fait ressortir et nous fait entendre un beau discours sur la notion de propriété. On sourit, on est ému, on se revoit lors de nos visites... Je suis fan de Bruno Podalydès et de ses propositions souvent originales et décalées mais qui racontent toujours l’âme humaine. Un film agréable et sympathique qui m’a laissée néanmoins un petit soupçon de pas assez. Pour l’anecdote, il a été tourné en 4 semaines, c’est assez rare pour être remarqué.

Rédigé par Carole Nipette

Publié dans #Avis cinéma-Revue de films

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C
J'aime ces films, en conséquence j'aime vivre comme dans ces films.
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D
Rebonsoir Carole, Dernière nuit à Milan confirme le talent de Pierfrancesco Favino qui devient un acteur incontournable comme on dit. Love Life est un film magnifique et émouvant. Elémentaire m'a déçue et Wahou m'a plu et pourtant je ne suis pas fan des films de Bruno Podalydès. Bonne soirée.
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T
Le seul que j'ai vu, c'est "Elémentaire". Bien aimé les séquences "nourriture" ou "boisson" où il faut "faire avec" les mets de l'autre... <br /> C'est gentillet. Mais on ne sait pas ce que pourrait donner le métissage !<br /> (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
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C
Justement ce que j'ai aimé c'est que lorsqu'on s'en donne les moyens le métissage se passe bien :)